J’aurais aimé que le temps s’arrête à cet instant précis, que plus rien ne bouge, que la vie ne se résume plus à de longues et monotones secondes qui s’écoule. J’aurais aimé que ce moment dur toujours. Moi, serrée contre lui, ma tête enfouie dans son coup, sentant à pleins poumons son odeur réconfortante. Nos jambes entrelacées, mes cheveux mêlés, sa main sur ma cuisse. Et puis le réveil qui sonne, sa main qui se retire, le lit qui se retrouve vide à côté de moi. Seul le drap légèrement plissé et tiède montre que quelqu’un avait été là, quelques instants plus tôt. Je me retourne, redresse la tête et sourit gentiment. Il ne me répond pas, enfile son pantalon, boucle sa ceinture, ébouriffe ses cheveux et s’assoit près de moi. Pendant de longues minutes, il reste là, le regard flou et moi, comme une imbécile, je le regarde, assez naïve pour espérer encore un toi & moi avec Max. Il tourne sa tête lentement, et d’une voix éteinte il prononce les mots les plus durs qu’il me fallut entendre de toute ma vie : « Ecoute, je suis fiancé, ma copine est enceinte. J’crois pas que ce soit une bonne idée, toi et moi… Pour le bébé, tu comprends… ». Je hochai la tête, la bouche pendante. Je n’en revenais pas, je n’y croyais pas. Je ne voulais pas y croire. Alors ça y est, c’était finit ? Tous nos après-midis où l’on redevenait des gamins, toutes nos matinées que l’on passait à s’embrasser, toutes ces heures de cours que j’ai séché pour lui, toutes ses nuits de corps à corps. Disparus ? Envolés ? Oubliés ? Impossible. C’était l’homme de ma vie. Il était ancré en moi, jusqu’à ma moelle. Il était ma raison de vivre, mon oxygène, ma bouffée d’air pur. Chaque instant passé avec Max valait autant que l’éternité à vivre au paradis. C’était ma moitié, mon cœur, mon homme. Il ne pouvait pas partir, en emportant avec lui tous nos bons moments. C’était impossible.
Il se leva sans un mot et enfila son tee-shirt. Il s’approcha et je fermai les yeux, le cœur battant à tout rompre, le souffle court. Sa main passa dans mes cheveux, remettant en place quelques mèches. Ses lèvres délicates se déposèrent sur les miennes et le temps d’un instant je crus qu’il avait changé d’avis. Sans vraiment que je me rende compte, mes mains glissèrent sur ses cheveux et redescendirent le long de son coup, s’agrippant à son tee-shirt, vint moyen de le garder un peu plus longtemps près de moi. Il s’arracha à moi, et dit simplement : « Désolé Céleste, vraiment… »
J’aurais aimé le retenir, me serrer fort contre son torse, lui faire une déclaration si belle qu’il n’aurait pas pu me quitter. Mais je ne trouvai rien à dire, et je n’avais même pas assez de force pour le regarder passer le pas de la porte et disparaitre à jamais. Je contempla sans mot dire ma vie s’effondrer et ne réussit qu’à verser une larme avant de m’allonger sans bruit dans mon lit, enfouie dans mes draps sentant encore son odeur. Voilà, c’était bel et bien finit, une partie de ma vie venait de se tourner. D’habitude, dans les livres pour enfants, ça commence mal et ça finit bien. Pour moi, ça à commencer bien, trop bien. Dès le début, je le savais. Cet amour trop grand, qui me rongeait à petit feu, cette envie chaque jour plus grande, qui me dévorait sans que je m’en rende compte, et puis cette première nuit, si belle, si intense, et toutes les autres qui ont suivi après ça. Ces années si belles, ces instants si précieux. J’aurais dut le voir, le sentir, le prévoir. Mais j’étais amoureuse. Et ce qui fait mon malheur c’est que je le suis toujours. Alors évident, comme je ne vis pas dans un film Hollywoodien ou dans un conte de fée, la fin se casse la gueule, et en beauté.

Je me sens vide. Tellement vide. Comme si mes sentiments c’étaient évadés de mon cœur en creusant un tunnel avec une petite cuillère. J’ai mal, tellement mal. Je ne pensais pas que le vide pouvait nous faire à tel point souffrir. J’ai l’impression d’être une petite coque de noix à la dérive sur un immense fleuve, sans escale et sans destination, perdue au milieu de nulle part. J’aimerais remonter dans le temps, inverser le sens des aiguilles de ma montre, revenir en arrière, éviter cette connerie qui maintenant guidera chacun de mes pas, engendrera chacune de mes larmes. Putain qu’est-ce que je peux être conne parfois ! Je me sens tellement vide ! Comme privé de quelque chose, de vital. Une douleur intense sort de ma poitrine gauche et, je le sais au fond de moi maintenant, ne s’arrêtera jamais de me ronger. Un peu plus chaque seconde, je sens les lambeaux de mon cœur qui se déchirent encore plus, ne laissant qu’un petit tas inerte, saignant de toute part. Et j’aurais pu éviter cela. Mais j’ai été lâche, comme toujours.

| FLASH |
« Maman ? Faut que je t’avoue quelque chose. C’est… c’est très important. Ecoute, je… je suis enceinte. » Voilà, c’était dit, j’avais lâché le morceau, avoué le pire secret qu’il m’avait fallu garder. C’est comme si l’on m’enlevait un poids immense qui s’abattait depuis déjà une semaine sur mes épaules. On me l’enlève, pour en remettre un aussitôt, bien plus lourd encore.
Ma mère se stoppa net dans sa lecture, tourna la tête vers moi avec une expression qui me fit froid dans le dos. Evidemment, je savais qu’en apprenant la nouvelle, elle se sauterait pas de joie. Je m’étais même imaginée une centaine d’expressions et de réflexions que ma génitrice aurait pu me faire. Complétement démoralisée, affairée, énervée, totalement folle. J’avais anticipé le pire, enfin je le pensais. Mais devant son regard noir et éteint en même temps, sa mâchoire serrée, et ces petites rides qui venaient de se former aux coins de ses yeux, j’avais l’impression de redevenir une gamine de 3 ans qui venait de faire une connerie. « Tu es ? Enceinte ? J’ai du mal comprendre Céleste. Dis-moi que j’ai mal compris. » « Non maman, tu as parfaitement entendu. » Les poings serrés et le visage dur, elle s’approcha de moi, avant de me cracher au visage telle une vipère « Si tu n’avortes pas, tu n’es plus ma fille. Tu m’as bien compris ? » Tremblante et honteuse, j’hochai en signe d’acquisition, bien trop apeurée pour lutter contre elle. Depuis toujours, ma mère me fait peur. C’est un peu mon cauchemar, mais plutôt d’hanter mes nuits, et me fait vivre l’enfer le jour. C’est une sorte de dragon miniature, le feu en moins. Elevée dans la pure tradition bourgeoise, les règles et la discrétion sont ces principes. La richesse sont but ultime. Je voue une sorte d’admiration combinée à une haine implacable pour cette femme qui ne m’a jamais prodiguée une once d’amour. Mais sa force et son énergie la place haut dans mon estime. Et puis c’est ma mère. Je ne sais pourquoi, mais je n’arrive pas à lui en vouloir. Après tout, je devrais protéger mon enfant, non ? Mais face à elle, ce petit bout qui grandit dans mon ventre n’est plus qu’un mauvais souvenir. « Ah, au fait, pas la peine de prévenir tout le monde. Ça restera entre toi et moi, compris ? » Encore une fois, incapable de la contredire, j’acquiesçai.
|FIN FLASH|

C’est ainsi que je me retrouvai, contre ma volonté, dans une clinique privée et très discrète, en pleine campagne, soi-disant pour passer en week-end avec ma très chère mère, pour en réalité avorter.
Depuis, le fantôme de l’enfant que je n’ai jamais eu à rejoins le fantôme de Max, et tous les deux viennent chaque jour me rappeler mes erreurs de jeunesse, ma faiblesse et ma lâcheté.
Je n’ai jamais pu remplacer Max, l’amour de mes 17 ans. Ça fait beau quatre ans que cette histoire c’est passé, j’ai l’impression que c’était hier. Elle est désormais gravée en moi, enfoui au plus profond des dédales de mon cœur et, chaque jour, pour enfouir un peu plus ce passé, je joue de l’amour des hommes. Je me sens plus puissante. Je fais subir ce que l’on m’a fait subir, et je jouis de ce sentiment de vengeance. Mais les traces du passé ne s’effacent pas avec un simple coup de serpillère.

Citation :

PRÉNOM/PSEUDO : endless/alice ◭ AGE : pas encore l'âge de conduire ou de voter ◭ PAYS : France ◭ FRÉQUENCE DE CONNEXION : 3/7 ou 4/7 ◭ PERSONNAGE : sortit tout droit de ma p'tite tête ◭ Comment est-tu tombé sur JTL ? via Bazzart ◭ COMMENT TROUVES-TU JTL ? Il gère sa grand-mère ◭ UN DERNIER MOT ? Amen ◭